Un groupe de travail constitué essentiellement de magistrats vient de remettre au garde des Sceaux un rapport sur l’open data des décisions de justice. Parmi les recommandations formulées, certaines marquent un recul important pour la publicité de la justice, qui est pourtant un principe fondamental de notre démocratie.
Au nom de la sécurité, il est notamment proposé l’anonymisation totale des noms des magistrats et ceux des avocats dans les décisions publiées. Les auteurs du rapport souhaitent également occulter le nom des entreprises dans les jugements et arrêts, y compris civils et administratifs.
Une attaque de plus à la liberté d’informer alors que les restrictions se multiplient pour faire la lumière sur les agissements illégaux des entreprises. Surtout que, comme le reconnaît le rapport lui-même, « aucune application concrète d’éventuelles utilisations contraires aux intérêts économiques des entreprises françaises n’a été identifiée à ce stade ».
Autre idée attentatoire à la publicité de la justice : limiter davantage, par le biais de conventions et contre paiement, la remise de copie aux citoyens. Une restriction de l’accès à l’information qui complique la vie de tous, notamment celle des journalistes et des pigistes sans carte de presse.
La protection des personnels de justice est évidemment légitime et importante. Mais elle peut se faire en respectant le principe fondamental de publicité de notre justice. A quoi ressemblerait un jugement ou un arrêt sans mention du tribunal, du nom des parties, de celui des magistrats, des avocats, des entreprises, du département ?
L’Association de la presse judiciaire (APJ) et l’Association des journalistes pour la transparence (AJT) regrettent que le groupe de travail n’ait pas interrogé de membres de la société civile, et encore moins de journalistes spécialisés.
Elles dénoncent avec force et depuis des années l’opacité grandissante portée par des professionnels de la justice dont l’objectif est clair : écarter les citoyens de ce qu’ils considèrent comme leur domaine réservé.